Oligui Nguema a trahi et violé la Constitution en modifiant secrètement le texte entre le référendum et sa publication au Journal Officiel
Le 4 décembre 2024, lors de son discours à la nation après le référendum constitutionnel, le président de la Transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, a déclaré :"Cette nouvelle Constitution marque une étape concluante dans notre processus de Transition. Elle pose les fondements d'un État plus juste, plus équitable, où les droits de chacun sont garantis et où les Institutions sont au service du peuple."
Pourtant, cette promesse de transparence a été gravement reniée, s’ajoutant aux nombreux témoignages de tortures rapportés dans le pays ces dernières semaines. Le texte finalement publié au Journal Officiel diffère du texte initial soumis au référendum, portant ainsi atteinte à la volonté populaire.
Le Collectif Gabon 2025 a découvert ces modifications en comparant scrupuleusement la version adoptée par référendum avec celle publiée au Journal Officiel. Un rapport détaillé a été établi et rendu public sur le site www.gabon2025.com, fournissant le détail des passages altérés, accompagnés des deux versions du texte pour consultation.
Ces altérations, introduites sans consultation, violent à la fois la volonté populaire exprimée par le référendum et le caractère sacré de la Constitution. Parmi les articles modifiés figurent les articles 28, 46, 93, 164 et 168. Ces changements, perçus comme une trahison envers la volonté populaire, suscitent l’indignation et interrogent sur la sincérité des promesses de gouvernance transparente faites par le président de la transition, Brice Clotaire Oligui Nguema.
Un acte sans précédent dans le monde
Nulle part ailleurs dans le monde une Constitution adoptée par référendum n’a été aussi ouvertement modifiée avant sa promulgation officielle. Cette pratique, inédite dans un État de droit, démontre une rupture totale avec les principes démocratiques fondamentaux. Ce scandale place le Gabon dans une position singulière et déshonorante sur la scène internationale.
Penser qu’un tel acte pourrait passer inaperçu reflète un mépris pour les institutions nationales et pour le peuple gabonais, tout en exposant une faiblesse institutionnelle qui risque de fragiliser encore davantage le pays.
Une insulte à l'intelligence des Gabonais
Ces altérations, introduites sans aucune consultation publique, constituent non seulement une violation flagrante des principes démocratiques, mais aussi une insulte à l’intelligence du peuple gabonais. Penser que de telles modifications passeraient inaperçues témoigne d’un mépris alarmant envers les citoyens et leur capacité à défendre leur souveraineté.
Articles modifiés et leurs implications
Article 28 : Devoirs citoyens réduits
- Version soumise au référendum : "Chaque citoyen a le devoir de respecter et de défendre le patrimoine national et les biens publics, et de contribuer à la préservation ainsi qu’à l’amélioration de l’environnement."
- Version publiée : "Chaque citoyen a le devoir de contribuer à la préservation ainsi qu’à l’amélioration de l’environnement."
Implications : La suppression du devoir de respecter et de défendre les biens publics affaiblit l’importance civique de la protection des infrastructures et des ressources nationales.
Article 46 : Pouvoirs de l’intérimaire présidentiel élargis
- Version soumise au référendum : "Les pouvoirs exclus incluent notamment la dissolution du Parlement et les pouvoirs exceptionnels."
- Version publiée : "Ces exclusions ont été remplacées par des articles moins critiques, permettant potentiellement à l’intérimaire d’exercer ces prérogatives."
Implications : L’absence d’exclusions clés ouvre la voie à des abus de pouvoir en période de transition.
Article 93 : Réunions du Congrès limitées
- Version soumise au référendum : "Révision constitutionnelle et communications exceptionnelles du Président."
- Version publiée : "Révision simplifiée et communications ordinaires."
Implications : Le changement réduit la portée des réunions du Congrès, limitant son rôle dans des questions critiques.
Article 164 : Affaiblissement du contrôle institutionnel
- Version soumise au référendum : "La République Gabonaise, soucieuse de réaliser l’unité africaine, peut conclure souverainement tout accord d’intégration sous-régionale ou régionale, conformément aux articles 165 et 166 de la présente Constitution."
- Version publiée : "La République Gabonaise [...] conformément aux articles 162 et 163 de la présente Constitution."
Implications : Ce changement réduit considérablement le rôle de la Cour Constitutionnelle en matière de contrôle des engagements internationaux.
Article 168 : Révisions constitutionnelles facilitées
- Version soumise au référendum : "La révision de la Constitution ne peut être entamée ou achevée pendant l’exercice des pouvoirs exceptionnels prévus à l’article 62."
- Version publiée : "La révision [...] pendant l’exercice des pouvoirs exceptionnels prévus à l’article 63."
Implications : Le remplacement de l’article de référence affaiblit les garanties prévues en cas de révision.
Un exemple tiré du rapport : Une base militaire américaine au Gabon
Le rapport intitulé "Les modifications identifiées dans la Constitution gabonaise" (lien vers le rapport) explore un scénario hypothétique pour illustrer les implications des modifications constitutionnelles. Il imagine une situation où Brice Oligui Nguema, profitant des changements récents, facilite l’installation d’une base militaire américaine au Gabon.
Analyse du scénario
Le Gabon, situé stratégiquement en Afrique centrale, pourrait être vu par les États-Unis comme une plateforme idéale pour renforcer leur présence dans la région, justifiée par des préoccupations de sécurité et de lutte contre le terrorisme. Pour Brice Oligui Nguema, un tel projet offrirait l’opportunité de renforcer son pouvoir en obtenant un soutien international tout en contournant les mécanismes institutionnels traditionnels grâce aux modifications constitutionnelles.
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Article 164 : La réduction du contrôle de la Cour Constitutionnelle facilite la ratification rapide d’accords internationaux, même ceux compromettant la souveraineté nationale.
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Article 93 : La limitation des débats au sein du Congrès permettrait de valider l’accord discrètement, évitant une mobilisation publique ou parlementaire.
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Article 168 : Les pouvoirs exceptionnels pourraient être utilisés pour modifier la Constitution après coup, afin d’aligner les cadres juridiques nationaux sur les termes de l’accord.
Ce scénario met en lumière comment les changements apportés au texte constitutionnel affaiblissent les contre-pouvoirs institutionnels, rendant possibles des décisions stratégiques controversées sans consultation ni transparence.
Que peut-il se passer ?
- Retour au texte référendaire : Une révision immédiate et transparente pourrait rétablir la confiance, mais nécessiterait une mobilisation politique forte.
- Maintien du statu quo : Ignorer les contestations risque d’exacerber les tensions sociales et de miner davantage la légitimité des institutions.
- Recours internationaux : Des organisations régionales et internationales pourraient être saisies pour contester ces modifications, accentuant la pression sur le régime en place.
- Instabilité prolongée : L’absence de résolution pourrait engendrer un climat de méfiance durable et affaiblir encore davantage les institutions démocratiques.
Des recours en préparation
Face à l’ampleur du scandale, des recours juridiques sont actuellement à l’étude. Plusieurs avocats et organisations de la société civile envisagent de saisir la Cour Constitutionnelle, bien que son rôle ait été affaibli par les modifications en question. D’autres appellent à un recours auprès des instances internationales, telles que l’Union africaine et les Nations Unies, pour dénoncer une violation flagrante des principes démocratiques et de la souveraineté populaire.
Le Collectif Gabon 2025 étudie actuellement les différents scénarios de recours possibles et n’exclut pas d’engager lui-même une action pour défendre la volonté populaire et préserver l’État de droit au Gabon.
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